lundi 21 avril 2014




ANDY 

de 

Brigitte Kernel








"Je n'ai pas de mémoire,
mon cerveau est comme un magnétophone qui aurait une seule touche, 
pour effacer." 

Andy Warhol 







Je ne voulais pas m'arrêter là avec Brigitte Kernel dont le bouquin "ma psy, mon amant" -commenté  précédemment- m'avait déçu. J'ai donc emprunté ce roman (est-ce vraiment un roman d'ailleurs ? plutôt une biographie apocryphe romancée?) qui devait forcément me plaire compte tenu de l'admiration que j'ai pour Warhol. Effectivement ...

Je pressens que mon billet sera plus conséquent que les précédents tant mon envie de faire découvrir Andy Warhol est fort. Un homme-enfant, un artiste inquiétant, qui me fascine. 







Je vous emmène donc dans l'univers du petit prince du pop art à travers la subtile plume de Brigitte Kernel qui réussit par, un magnifique tour de passe-passe littéraire, à transformer l'icône en homme, tout simplement ..







Ce qui frappe le plus chez cet artiste entouré, admiré, riche, c'est cette profonde détresse, cette souffrance qu'il trimbalait, tiraillé qu'il était entre ses désirs de vivre sa vie, son homosexualité, sa différence ; et son éducation religieuse, l'autorité de sa mère, la peur de la décevoir, qui l'en empêchaient. Son oeuvre transpire cette douleur-là parfois. Et rend l'homme profondément attachant. 




                                  






Ses blessures, il les montre, les expose, presque avec fierté. 
Warhol, le crucifié, 
Warhol, le miraculé...








"Une balle de revolver, plus de dix organes atteints, normalement je suis mort, non?
Cette femme m'a tiré dessus ! Comment j'ai pu me sortir d'un truc pareil? Par quelle chance? Quelle miracle?
Parce que les médecins aux urgences ont fait ce qu'il fallait?
Grâce à ma mère? Elle a tant et tant prié.
Je ne sais plus si je suis vivant ou mort docteur, c'est affreux. Déjà que je n'ai jamais été certain de vivre dans le réel..."






        Andy's Factory






"Peindre comme je le fais, en travaillant jusqu'à l'épuisement, sans penser, comme une usine, je vous assure, c'est extraordinaire. Tout mon corps participe, mes bras, mes jambes, mes pieds, mon torse, mes épaules, je porte des pots, je brandis un pinceau, je m'étends sur le papier, je fais des contours au majeur.









Je m'accroupis sur une jambe, me tourne pour tremper mon pinceau dans un bocal. Je déroule une nouvelle toile comme on le fait avec un tapis et je peins au fur et à mesure sur le fond. Je mets un genou sur la toile, je me penche, je me tends, je travaille avec le majeur. C'est physique. J'oublie tout. Je ne suis plus ni vivant, ni mort, je suis dans la production de quelque chose, c'est tout.









J'aime être à cet endroit-là. Sur cette surface. Je voudrais ne plus en bouger. C'est tellement plus simple de vivre ainsi. Sans l'impression qu'on va se remettre à trembler ainsi que ça arrivait dans votre enfance."









"C'est quoi un artiste?

Quelqu'un qui crée, 
qui explore son époque, 
quoi d'autre ?
Un homme qui met des sentiments ?
Mais non ! 
C'est bel et bien fini ça, le sentimentalisme ! 
Et ça me va si bien ..."










"Vraiment les gens ne savent que dire du mal des autres. 
Mes Marilyn y passent, du coup, les séries aussi, on dit que je fais des portraits multiples pour que personne ne comprennent qui je suis réellement. Comme s'il y avait du réel en moi ! Il n'y a rien !
Rien au-dessus, rien en dessous de mon travail, de mon image ! Enfin, c'est ce que je veux. Anéantir tout sionnisme, dans la révélation.
Une vie pour arriver à ça !
Plus je produis, plus je disparais non ? 
Enfin, c'est ce que je croyais ! Et finalement, peut-être que je me révéle, peut-être que les failles, les gouffres, les reliefs surgissent malgré tout."








MERCI Brigitte Kernel de permettre d'approcher au plus près 
cet homme, cet artiste, 
fragile, 
et malmené par la vie. 

Un magnifique roman ! 







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